RUE de l'AFRiQUE, ENCORE & ENCORE, + + +
Je suis heureux d'avoir connu L'AFRIQUE. Je ne sais pas si j'y retournerai - je n'en crois rien, sauf pour mourir -, mais je suis heureux de l'avoir connue. Ses terres sèches, plates, infinies. Cette mer sans fin, sans barre, sans fond, sans aucun sens, et surtout : sans rivages. Un peu comme si, en se lançant dessus, on avait été sûr de n'arriver nulle part. Quelque part, c'est ça, l'Afrique. Et puis aussi sûrs que "L'Afrique ne bouge pas". Ce que remarquait, amer et déçu, un ami un brin de gauche et qui y passait sa vie à se la perdre.
" Toute la jeunesse aboutit sur la plage glorieuse, au bord de l'eau, là où les femmes ont l'air d'être libres enfin, où elles sont si belles qu'elles n'ont même plus besoin du mensonge de nos rêves "
LF Céline
L'Afrique il y a quarante ans : Côte d'Ivoire.
Là bas, seuls les crocos nous faisaient peur, et aussi l'esprit sournois des morts, qui flottait entre deux eaux dans la lagune de Fresco. Qu'est devenu " Yaum' ", Guillaume, le souple petit Ivoirien à qui son grand-père avait confié sa pirogue, le meilleur de leurs biens ? Il refusait de manger nos boites de macédoine en conserve, et c'est vrai que c'était bien mauvais. Peut-être a-t-il fait l'Agro, ou médecine, ou rien. Peut-être est-il mort d'un coup de machette, du paludisme ou d'un accident de mobylette. Mais plus les années passent, plus la photo de mon vieux pote M., à l'avant de la pirogue me semble mystérieuse. Peut-être aussi est-ce ma propre jeunesse qui je ne reconnais plus, Clara ? Et puis, où il est, le port ? Le ponton ? Où sont les filles de joie ? Le téléphone ? L'endroit où on descend, quoi ?
Ambiance survoltée en plein après-midi. Deux, trois, dix jeunes femmes avancent vers moi, bougeant, dansant, je les shoote au jugé, mon appareil sur l'estomac, extra, je n'insiste pas
C'est vrai, je suis un voyeurn fier de l'être mais salut, les filles, je m'en vais : un photographe doit avant tout savoir courir vite. - Oui, mais les noirs courent plus vite que les blancs ?
201... Où sont-elles passées ? Mes doudous ? Voilà près de 20 ans que cette image a été faite. Je ne me lasse pas de leurs seins, offerts sans penser à mal (?), mais de façon un brin inégale, au voyageur : comme autrefois, j'ai droit à leurs corps, à leurs seins, à leur voix, mais... Mais c'est une INEGALITÉ HISTORIQUE bien connue, et donc je ne me risquerais pas à leur montrer mon outil.
- On revient toujours sur les lieux de ses crimes, Monsieur ?

- Plus pour longtemps.
Mieux vaut partir à la recherche de princesses qui s'ignorent que que le monde ignore aussi, d'ailleurs, et pour encore un bail. Un rien d'Europe ou d'occident : les cheveux raides, le sexe rasé (pas très bien, à refaire) et une jolie fente, ma foi, distinguée.
Réserve de la Maraoué
